647 - 44 On s'échappe... ou pas
Heibao vient vers moi et il me dit :
— Tu sais, j’aurais préféré rester avec toi.
Je le regarde et il voit des points d’interrogation défiler dans mes yeux... si, c’est possible. D’ailleurs, il me répond :
— Nous sommes obligés de suivre le scénario.
— L’IA ?
— Avant on disait Dieu, maintenant c’est une IA. Tu n’as aucune cicatrice, tu es en pleine forme... D’accord, c’est pénible par moment, pour moi aussi.
Je lui montre mes fesses en disant :
— Et ça ?
Je veux parler de la marque au fer rouge. Il répond :
— C’est provisoire.
— Tu viens avec moi ?
— Non, mais on se reverra, promis et...
Tout à coup, je sens une différence, comme si... j’étais libre. Heibao me dit :
— L’IA ne nous contrôle plus.
— Oh oui, mon chéri, je le sens aussi.
— Viens.
Il me prend la main et on se dirige vers le canot. Une fois à bord, on va vers le yacht qui est ancré un peu plus loin.
Il y a un homme à bord, Heibao lui dit :
— Va vite sur l’île avec le matériel médical, un des hommes à un gros problème.
Est-il crédible ? Pour moi, non, pour l’homme, oui. Il va chercher une valise et se précipite dans le canot, tandis que Heibao a pris les commandes du yacht et on file à toutes voiles, c’est une image. On navigue des heures, jusqu’à ce qu’on s’approche d’une plage. Heibao me dit :
— C’est le sud de la Chine. Ici, c’est une autre IA.
Il mouille l’ancre et on plonge dans la mer. Grâce au Ciel, tous les requins sont à un congrès. On arrive sains et saufs sur la plage. Je dis à Heibao :
— Enfin libre, mon chéri.
Il regarde autour de nous et répond :
— Je l’espère vraiment. Si ce n’est pas le cas, on se retrouvera toujours.
— Parole de panthère ?
— Oui...
On passe trois jours sur cette plage, trois jours de paradis, on baise comme... des amoureux... On mange et on boit. On a tous les deux été des panthères, il nous en reste quelque chose. Le troisième jour, il me dit :
— Il y a un combat, je le sens...
Moi pas. Je lui dis :
— J’ai envie de toi...
— Moi aussi, tu le sais bien et je te jure que ce ne sera pas la dernière fois.
On fait l’amour comme des amoureux dans la position du missionnaire. Je prends ses fesses en main pour qu’il s’enfonce plus profondément en moi... Et, là... vous connaissez ce jeu « freeze » où on doit tout à coup s’immobiliser ? Une IA doit gueuler « FREEZE ! » quelque part, parce qu’on reste collés l’un à l’autre et on peut même dire l’un dans l’autre.
Là on entend une jolie voix grave de femme qui dit :
— Mes enfants...
Est-ce le Seigneur qui nous parle ? Ou alors une IA ? La voix poursuit :
—... je n’ai pas apprécié que vous profitiez des quelques problèmes que j’ai eus pour vous enfuir comme des voleurs. Ce n’est pas courageux de profiter de ma... faiblesse passagère...
S’ensuit un joli rire, puis la voix poursuit...
— Mais je vous aime, j’ai adoré Heibao et sa femelle. Hélas, je vais devoir vous punir. Vous allez perdre connaissance, mais je vous promets qu’après un passage dans une sorte de purgatoire pendant un... ou plutôt deux mois, vous vous retrouverez et une IA tient toujours sa parole. Vous ne garderez que quelques bribes de votre fuite en mémoire. À bientôt mes enfants chéris... et dorénavant, ne me fuyez jamais... jamais...
Soupir.
Heibao est toujours profondément enfoncé en moi et nos langues se pressent l’une contre l’autre... On perd doucement connaissance.
***
Je me réveille, assise dans un avion... je suis habillée d’un short, tee-shirt, baskets. Je suis qui ? Ah oui, Mila, mais alors, où est Heibao ?? Je n’ai que de très vagues souvenirs d’une fuite... On faisait l’amour et là... On nous a promis une punition. Je vais où ?
Autour de moi, il y a des jeunes femmes et des jeunes hommes qui n’ont pas l’air plus heureux que moi. Je vois une hôtesse et j’ai envie de lui demander notre destination. Elle pensera que je suis un peu simplette, ce que je suis. Je lui dis :
— Mademoiselle...
Je la vois et elle me regarde aussi, mais elle ne bouge pas. Je crie :
— MADEMOISELLE !
Elle arrive et me dit :
— Tu dois te taire !
Je réponds :
— Je me plaindrai de votre attitude.
Elle rit. Un homme costaud arrive... Il me prend par une oreille. Je crie et je suis obligée de me mettre debout. Il me fait mal, je lui dis :
— Vous me faites mal Monsieur, je serai sage, je vous jure.
Il me lâche, je mets la main sur mon oreille en gémissant. Il me dit :
— Tout a changé, petite... On va atterrir sur le grand aéroport de Rio, centre de la Confédération des États d’Amérique du Sud, et nous ne plaisantons pas avec les étrangers qui n’ont pas de papiers et qui ne sont pas polis. Tu as compris ?
— Oui Monsieur, pardon.
— Bien, on te donnera à manger et à boire. On atterrit dans quelques heures.
— Merci Monsieur.
Putain de merde ! Oui, c’est ce que je pense à ce moment-là. C’est une IA qui m’envoie là. Je dis une IA, d’abord parce que c’est ce qu’il faut dire et ensuite, là aussi, j’ai un très vague souvenir d’une voix de femme. Je ne sais pas ce qui va m’arriver, sauf que je ne vais pas me la couler douce, comme j’espérais...
Sans un mot, l’hôtesse me balance un sandwich emballé dans un vieux morceau de journal et une bouteille à moitié remplie d’eau. Je lui dis :
— Merci et pardon pour...
Elle me coupe la parole en disant :
— Ferme-la.
Ouch ! Suis-je en enfer ? Satan s’amuse à mes dépens ou alors une saloperie d’IA. On atterrit avec pas mal de cahots. Sûr que je ne vais pas applaudir l’atterrissage. Deux hôtesses et le mec costaud applaudissent. On descend tous de l’avion, la tête basse. On entre dans les immenses bâtiments de l’aéroport. Une hôtesse nous guide vers les deux portes transparentes. Au-dessus de l’une d’elles, il est indiqué « Citoyens de la Confédération » et sur l’autre « Étrangers ». C’est nous, hélas...
Les citoyens passent sans problèmes. Je remarque que les « étrangers», nous sommes tous jeunes et plutôt pas mal physiquement et même mieux que ça.
Quand on descend de l’avion, je remarque qu’il y a beaucoup de gens assis pour regarder notre arrivée. Ils n’ont rien de mieux à faire ? Contrairement à nous, je remarque aussi qu’ils ne sont pas jeunes et beaux comme c’était souvent le cas, dans les autres pays pour ceux qui le voulaient. Ici, dans l’ensemble, ils sont tous bien habillés, mais souvent gros, pas beaux et de tous les âges. Ils sont aussi de toutes les couleurs : quelques Blancs et quelques Noirs, mais surtout beaucoup de Métis.
Les filles doivent aller dans un couloir, les garçons dans un autre. Je suis la première de la file, j’aime pas ça. Un policier nous dit :
— Déposez vos vêtements et vos bijoux sur ce tapis roulant.
Des bijoux ? Il est farce ! Ils sont tous de café au lait à noir. Les Blancs ont disparus. Dans la file des garçons, l’un d’eux dit au policier :
— Je veux garder ça, parce que...
La suite, c’est :
— Aaaaïïeeee !!
Parce qu’il vient de se prendre une décharge de taser dans les couilles. Les spectateurs rient de bon cœur. En pleurant, il se déshabille puis dépose une babiole sur le tapis roulant. Quand il est nu comme un ver, il passe les montants d’un détecteur de métaux. Il n’a rien de métallique. Le policier s’adresse à un gros homme vêtu de noir en disant :
— Tu le prends ?
— Je les prends tous.
Le policier dit au jeune homme :
— Va te mettre face à ce mur, les mains croisées dans la nuque.
Il arrête de se tenir les couilles et va se mettre face au mur. Le gros homme dit :
— Jolies fesses, ce sera un plaisir de l’enculer.
Ça fait rire les spectateurs. Mais pourquoi est-ce que je tombe de Charybde en Scylla ? Pour ceux qui ont raté le cours de géographie mythologique, Charybde était un écueil et Scylla un tourbillon très dangereux en Méditerranée. Quand un capitaine échappait à l’un, son bateau se retrouvait face au suivant qui était pire. Je veux partir...
— Aïe !!!!
Merci Scylla, je viens de prendre une décharge de taser dans la chatte. Je gémis, les deux mains sur la chatte. Le policier me dit :
— Tu es sourde ?
— Non, Monsieur.
— Toutes à poil et les vêtements sur le tapis roulant.
On se déshabille toutes et on pose nos quelques vêtements sur le tapis roulant.
Le policier regarde une grosse femme en noir, la même que l’homme en noir, sauf le sexe. Elle dit :
— Moi aussi, je les prends toutes.
Le policier me dit :
— Va te mettre face à ce mur, les mains croisées dans la nuque.
Le gros amateur du jeune homme dit à la femme au Noir, notre nouvelle propriétaire :
— J’enculerais volontiers quelques-unes de tes pouliches, si tu es d’accord, Juana.
— Pas de problèmes, viens à l’école.
Quelle école ? Ils sont fous ? On est tous nus devant un mur, les mains croisées dans la nuque. Le taser est un excellent argument pour faire obéir quelqu’un.
Un policier arrive et il nous menotte toutes ensemble l’une à l’autre. Un autre homme prend la main de la fille qui est à un des bouts et on suit toutes, fatalement. Dans le bâtiment et à l’extérieur, il y a une foule de gens de toutes les couleurs, qui nous insultent et nous crachent dessus. Le mot « puta » revient souvent. J’aime pas faire la pute, n’empêche que je rêve d’un beau bordel avec des tenanciers et des clients beaux et sympas. Je rêve de ça, parce que j’ai peur de ce qui nous attend ici.
On monte dans un camion, les jeunes gens aussi. L’homme monte avec nous et il nous dit :
— Tous assis par terre.
Le camion démarre. Je suis sûre qu’on va aller dans une jolie station balnéaire et avoir la belle vie... ou alors exactement le contraire. Bordel de saloperie d’IA. Faut me comprendre, j’en ai top marre ! On roule... Le camion n’a rien à voir avec une IA. On est secoués, il doit y avoir des trous dans cette route.
J’ai soif, faim et envie de faire pipi. Ma voisine de menottes est un clone de moi-même : elle est blonde avec des petits seins et je suis sûre qu’elle doit avoir un beau cul. Elle a un poignet menotté à moi, comme nous toutes, mais elle me caresse doucement la cuisse du dos de la main. Je lui fais un petit sourire. Un grand sourire pourrait alarmer le garde, genre « Quoi, des filles se sourient ! ».
À suivre
Un grand merci à Bruce Morgan pour ce super dessin.
Notre nouveau livre s’appelle : « Lizy, soumise autour du monde », il y a 60 illustrations de Bruce Morgan et vous allez l’adorer. Il est ici :
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